La spiruline: un potentiel pour les maladies neurodégénératives?
À quoi sont dues les maladies neurodégénératives?
L’un des facteurs impliqués au début de ces maladies est la perte d’intégrité de la barrière hémato-encéphalique, par exemple déclenchée par des processus de vieillissement, des toxines, des maladies virales ou auto-immunes. Des cellules immunitaires périphériques peuvent alors migrer dans le système nerveux central (SNC) et activer des cellules gliales (microglies, astrocytes), lesquelles, en tant que composantes d’un système de défense efficace, peuvent à leur tour provoquer des processus inflammatoires.
Cette inflammation des neurones représente une protection importante du système nerveux central contre les pathogènes et a pour fonction, entre autres, de rétablir l’homéostasie cérébrale. Une activation persistante des cellules gliales et des processus inflammatoires chroniques entraînent toutefois une augmentation excessive de médiateurs d’inflammation tels que les chémokines et les cytokines ainsi que d’espèces oxygénées et azotées réactives, ce qui cause avec le temps des lésions neuronales.
Par ailleurs, la diminution des mécanismes de défense antioxydants liée à l’âge rend le cerveau plus sensible aux effets néfastes du stress oxydatif. De nombreux indices suggèrent que l’inflammation des neurones et le stress oxydatif jouent un rôle synergique fondamental dans la genèse et la progression des maladies neurodégénératives.
Quel rôle joue la spiruline dans le cerveau?
La spiruline contient une haute teneur en antioxydants, notamment en phycocyanine, un pigment bleu. Des essais in vivo ont permis d’observer que la phycocyanine ou un métabolite (phycocyanobiline) peuvent traverser la barrière hémato-encéphalique puis inhiber, entre autres, la production de composés oxygénés réactifs déclenchée par l’activation de microglies dans le SNC.
D’autres études précliniques ont montré que la spiruline exerce son effet antioxydant et anti-inflammatoire d’une part en réduisant, dans des conditions neurodégénératives, l’activation de cellules gliales, les cytokines pro-inflammatoires et l’activité de l’oxydase NADPH, d’autre part en régulant à la hausse les enzymes antioxydantes telles que la superoxyde dismutase (SOD), la glutathion peroxydase (GPx) ainsi que les facteurs neurotrophiques brain-derived neurotropic factor et nerve growth factor.
Utilisation de la spiruline dans les maladies neurodégénératives
Parkinson
La maladie de Parkinson se caractérise par une dégénérescence sévère de neurones dopaminergiques dans la substance noire et par la formation de corps de Lewy (protéines anormalement phosphorylées) dans les cellules neuronales restantes. Les neurones dopaminergiques sont très sensibles au stress oxydatif et aux inflammations, lesquelles sont causées en partie par les cellules microgliales activées et favorisent la progression de la maladie.
Des études sur des modèles de Parkinson expérimentaux ont montré que la spiruline ou des composants de la spiruline n’activent pas seulement des systèmes enzymatiques antioxydants (SOD, GPx), mais réduisent également, entre autres, le nombre de cellules microgliales activées, régulent à la hausse l’expression de l’ARNm du transporteur de la dopamine et de la tyrosine hydroxylase (enzyme limitante dans la synthèse de la dopamine) et freinent l’activité de la monoamine oxydase B, qui est responsable de la dégradation de la dopamine.
Alzheimer
Dans la pathogenèse d’Alzheimer, les oligomères bêta-amyloïdes solubles extracellulaires et les neurofibrilles de la protéine Tau jouent un rôle central. Cependant, l’origine de leur formation et leur importance dans l’évolution de la maladie n’ont pas encore été clarifiées définitivement. L’augmentation de cette protéine spéciale dans le SNC entraîne une activation de cellules microgliales et une inflammation des neurones fortement impliquées dans la progression de la maladie.
Comme pour la maladie de Parkinson, des modèles in vivo et in vitro ont montré que la spiruline réduit la concentration d’oligomères bêta-amyloïdes dans l’hippocampe, inhibe l’activité de l’acétylcholinestérase et augmente le taux de GPx et de glutathion réductase. Il a également été constaté que la phycocyanine pouvait bloquer l’activité de l’α-sécrétase (enzyme impliquée dans le clivage de la protéine précurseur bêta-amyloïde).
Sclérose en plaques
Enfin, la spiruline a également montré un effet protecteur dans la sclérose en plaques (SEP), une maladie caractérisée par des processus de démyélinisation évoluant par poussées inflammatoires aiguës et une lésion axonale.
Dans le modèle animal de SEP, la phycocyanine a pu réguler à la hausse l’expression d’une série de gènes liés à la remyélinisation et à la gliogenèse et réduire significativement l’expression de gènes impliqués dans le processus de démyélinisation. L’administration de phycocyanine a également entraîné une réduction des cytokines pro-inflammatoires dans le SNC et une induction des lymphocytes T régulateurs, dont la fonction est altérée chez les patients atteints de SEP, ce qui conduit au final à la perte de l’autotolérance immunologique.
Conclusion
Les traitements pharmacologiques disponibles actuellement ne peuvent malheureusement ralentir la progression des maladies neurodégénératives que dans certaines limites. Compte tenu de l’importance du rôle joué par le stress oxydatif et l’inflammation des neurones dans la genèse et le développement de ces maladies, des substances naturelles telles que la spiruline, avec leurs propriétés anti-inflammatoires et antioxydantes, sont des options intéressantes pour le développement de stratégies thérapeutiques complémentaires.
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Literatur
Trotta T et al. Beneficial Effects of Spirulina Consumption on Brain Health. Nutrients 2022;14:676.